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Irlande du Nord(Royaume-Uni) |
Capitale: Belfast |
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LIrlande
du Nord (angl. Northern Ireland) constitue la partie nord-est de l'île
d'Irlande. Cette région de 14 148 km2 (soit 1/5 de la république
d’Irlande: 70 283 km2) est enclavée au nord-ouest et au sud par la république
dIrlande, mais elle est bordée à lest par le canal du Nord et la
mer dIrlande (voir la carte 1). On sait
que le nord de lIrlande est séparé politiquement du sud de lIrlande
depuis 1921.
LIrlande du Nord fait partie du Royaume-Uni (angl. United Kingdom) avec lÉcosse (angl. Scotland), lAngleterre (angl. England) et le pays de Galles (angl. Wales), alors que la république dIrlande au sud forme un État indépendant depuis 1937 (voir la carte 2). |
L'Irlande du Nord est aussi appelée l'Ulster dont elle comprend six (Antrim, Armagh, Derry, Down, Fermanagh, Tyrone) des neuf comtés historiques, les trois autres (Donegal, Monaghan et Cavan) faisant partie de la république dIrlande. En fait, toute l'île d'Irlande quatre grandes provinces historiques: l'Ulster (Ulaidh) au nord, le Connaught (Connacht) à l'ouest, le Munster (Mumhain) au sud et le Leinster (Laighin) à l'est. On peut visualiser la carte des comtés de toute l'île d'Irlande, mais il faut distinguer l'Irlande du Nord de la république d'Irlande. Pour les Irlandais de la République, les six comtés de l'Irlande du Nord sont «sous domination britannique». Depuis le 2 décembre 1999, des pouvoirs décentralisés (dévolution) ont été transférés à l'Assemblée irlandaise et à l'Exécutif d'Irlande du Nord.
Les habitants de lIrlande du Nord sont dorigine anglaise, écossaise ou irlandaise. Ceux dorigine anglaise et écossaise communément appelés Ulster-Scots forment la majorité d'une population (60 %) de 1,7 million d'habitants: ils sont de religion protestante et veulent généralement poursuivre la politique de rattachement avec la Grande-Bretagne.
Les autres 40 % sont des Irlandais de souche, cest-à-dire des catholiques et des nationalistes natifs de lUlster, et ils sont généralement considérés comme des indépendantistes prônant le rattachement avec la république dIrlande. Cependant, même si les protestants constituent 60 % de la population d'Irlande du Nord, ils sont peu à peu rattrapés par les catholiques, dont le taux de natalité reste plus élevé. Dans les écoles des villes où lon retrouve des catholiques et des protestants, les enfants de confession catholique sont aujourd'hui déjà majoritaires. Les catholiques sont concentrés à proximité de la frontière avec la république d'Irlande et dans certains ghettos urbains de Belfast (la capitale) et de Londonderry.
Selon le recensement de 1991, seulement quelque 142 000 locuteurs (9,4 % du total) parleraient encore l'irlandais en Irlande du Nord: ce sont tous des catholiques irlandais. Mais il est impossible de déterminer avec précision leur maîtrise de la langue irlandaise. Comme le gallois et le gaélique écossais, lirlandais est une langue indo-européenne appartenant au groupe celtique.
L'île de l'Irlande, occupée par les Celtes depuis le IVe siècle avant notre ère, a connu plusieurs occupations au cours de son histoire: les Vikings norvégiens et danois au XIe siècle, les Normands au XIIe siècle, les Anglais au XVIe siècle. Après avoir été complètement dominée et exploitée par l'Angleterre, l'Irlande obtient son autonomie législative en 1782-1783 en tant que «nation protestante libre» avec ses deux parlements, l'un à Dublin (sud), l'autre à Belfast (nord).
3.1 La Loi d'Union
La Loi déclaratoire de 1719, selon laquelle les lois adoptées à Londres s'appliquent en Irlande, fut révoquée par Londres. Cela nempêcha pas les Irlandais catholiques, alors dominés par un parlement protestant, de se révolter contre l'Angleterre. En 1800, le parlement de Westminster vota une Loi d'Union avec l'Irlande qui forma dès lors un Royaume-Uni avec la Grande-Bretagne appelé le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et dIrlande.
Tout au cours du XIXe siècle, les mouvements indépendantistes irlandais s'intensifièrent et se durcirent. Après une guerre d'indépendance entre 1918 et 1921, Londres décida par le Home Rule (1922) de constituer deux parlements "religieux" en Irlande: l'un, à majorité anglo-protestante, dans la province de l'Ulster (capitale: Belfast), l'autre, à majorité anglo-catholique, dans le reste de l'Irlande (capitale: Dublin). Les deux Irlandes, celle du Nord et celle du Sud, devaient toutefois prêter serment d'allégeance à la couronne d'Angleterre, car elles faisaient toujours partie du Royaume-Uni. La guerre civile reprit de plus belle. La majorité protestante d'Irlande du Nord accepta ce Home Rule limité et élut son propre parlement en mai 1921. Cependant, cette partition fut rejetée par la minorité catholique du Nord et par la majorité des Irlandais du Sud. Les efforts déployés pour mettre en place un nouveau gouvernement au sud ne contribuèrent qu'à renforcer la position du parti sécessionniste, le Sinn Fein.
3.2 À la suite de la république d'Irlande
En 1949, l'Irlande catholique du Sud proclama unilatéralement son indépendance et prit le nom officiel de république d'Irlande. Lirlandais et langlais devinrent les deux langues officielles de la République. Quant à l'Irlande du Nord, majoritairement protestante, elle continua d'être rattachée à la Grande-Bretagne tout en disposant encore de son parlement local à Belfast.
Néanmoins, le problème de l'Irlande nétait pas réglé pour autant. L'Armée républicaine irlandaise (l'IRA), qui veut réunir la province de l'Ulster (l'Irlande du Nord) à la république d'Irlande, intensifia sa lutte au point que l'armée britannique dut occuper l'Irlande du Nord en 1969. En 1972, le gouvernement de Londres décida de suspendre le gouvernement et dabolir le parlement de Belfast, puis d'imposer la loi martiale. Les députés de Belfast vinrent siéger au parlement de Westminster; l'Irlande du Nord fut à nouveau entièrement liée au gouvernement central de Londres jusqu'à l'accord de 1998 sur l'avenir de l'Usler.
Dans le but dinstaurer des réformes jugées nécessaires dans les institutions britanniques, le parlement de Wesminster a adopté la Loi sur l'Irlande du Nord (la Northhern Ireland Act de 1998) destinée à redonner à lIrlande du Nord son autonomie politique perdue. Le 10 avril 1998, à Belfast, un accord politique dune importance capitale a été conclu sur lavenir de lUlster. Cet accord, appelé laccord de Belfast (The Belfast Agreement 1998) et qui a permis de bâtir un triangle de coopération inédite entre Belfast, Dublin, et Londres, lie non seulement le Royaume-Uni et les partis politiques dIrlande du Nord, mais aussi la république dIrlande.
L’accord prévoyait, dès février 1999, le rétablissement du parlement de l’Irlande du Nord réunissant pour la première fois loyalistes protestants et catholiques irlandais. Il prévoyait également la création du Conseil Nord-Sud pour développer des politiques communes entre les deux Irlandes, la création du Conseil Est-Ouest réunissant des représentants du Parlement britannique, du nouveau Parlement écossais et du nouveau Parlement nord-irlandais. En outre, l’accord qui, rappelons-le, lie aussi la république d’Irlande, prévoyait que celle-ci accepte de modifier sa constitution afin de ne plus formuler des revendications territoriales sur l’Irlande du Nord; néanmoins, la Grande-Bretagne ne s'opposerait pas à l'union entre le nord (Irlande du Nord) et le sud de l'Irlande (république d’Irlande), si telle était la volonté de la majorité de tous les Irlandais en Ulster, catholiques comme protestants. Sur le plan de la langue, Londres s’engageait même à promouvoir la langue irlandaise là où les Nord-Irlandais (surtout catholiques) le désirent, c’est-à-dire dans l’enseignement, les arts et la culture, les médias, l’usage tant public que privé, et à militer contre tout ce qui peut en restreindre l’emploi.
Lors du référendum de mai 1998, les Irlandais du Nord ont approuvé laccord de Belfast dans une proportion de 71,1 %, les Irlandais du Sud, 94,4 %. De son côté, lIRA, lArmée républicaine irlandaise, a fait savoir par voie de communiqué quelle ne rendrait pas les armes. Or, la question du désarmement de lIRA a toujours bloqué lavancée du processus de paix. L'accord de paix accorde un délai de deux ans aux paramilitaires pour restituer l'intégralité de leur arsenal.
Comme en fait foi la Loi sur l’Irlande du Nord (Northhern Ireland Act) de 1998, l’autonomie politique dont bénéficie, à partir du 2 décembre 1999, le nouveau parlement de l’Irlande du Nord demeure assez réduite. En effet, l'Assemblée irlandaise de 108 membres élus a l'autorité de légiférer dans des domaines limités concernant les affaires intérieures telles que la justice, l’éducation, la culture, l’administration locale, le patrimoine, le logement, la santé, l’agriculture. C’était en février 1999 que Londres devait transférer à l'Assemblée irlandaise ses pleins pouvoirs en matière d'administration, à l'exception de secteurs comme la défense, la police et la fiscalité. Depuis 1998, toutes les institutions prévues dans l'accord ont dû être mises sur pied, notamment la formation du gouvernement local (l’Exécutif) de l’Ulster, qui devait être composé de six à huit membres. Encore faut-il que les protestants et les catholiques puissent travailler ensemble. Déjà, lors de l'ouverture solennelle (en septembre 1998) de l'Assemblée autonome d'Ulster au château de Stormont, catholiques et protestants se sont chamaillés pour savoir si le drapeau britannique devait flotter sur le parlement et si les débats devaient être traduits ou non en irlandais.
Notons également que toutes les lois irlandaises devront recevoir lapprobation du parlement de Wesminster, qui pourrait alors opposer son veto. Quant au rôle du secrétaire dÉtat de Sa Majesté, il a la responsabilité de représenter les intérêts de lIrlande du Nord au Conseil des ministres britanniques. Autrement dit, lIrlande du Nord fait encore partie du Royaume-Uni dont le Parlement ne perd aucune de ses prérogatives, notamment celle dadopter des lois concernant lIrlande du Nord. On peut déjà prévoir des conflits juridiques alors que les deux parlements adopteront des lois politiquement et juridiquement incompatibles.
En ce qui a trait à la langue, le parlement de Westminster peut légiférer pour faciliter et encourager l'emploi de la langue irlandaise là où il y aura une demande appropriée. Il devra supprimer tout obstacle qui empêcherait le développement de lirlandais, fournir des moyens pour assurer des communications avec toute autre communauté de langue irlandaise, créer un organisme administratif (lEducation Department) destiné à encourager linstruction en irlandais, fournir un soutien financier pour promouvoir la production de films et démissions de télévision en irlandais. Enfin, le gouvernement britannique devra sassurer que cet engagement sera poursuivi par le nouveau Parlement irlandais.
À supposer que toutes les dispositions linguistiques de l’accord de Belfast se concrétisent, il est peu probable qu’elles auront pour effet d’améliorer vraiment le statut réel de la langue irlandaise en Irlande du Nord, comme d’ailleurs en république d’Irlande. Par exemple, l’introduction de la traduction simultanée au Parlement irlandais ne changerait pas grand-chose dans la mesure où il existe peu de parlementaires parlant cette langue, à supposer que son emploi soit demandé et exigé par les catholiques. Dans la vie sociale et économique, les quelque 142 000 catholiques parlant l’irlandais et représentant 9 % de la population de l’Ulster ne pèseront pas d’un poids très lourd, pas assez en tout cas pour redonner vie à la langue irlandaise.
Quoi qu’il en soit, la paix en Irlande du Nord se trouve toujours dans une délicate position. Après trente années de conflit, les catholiques et les protestants ont souvent été dans l'impasse. Il y a eu deux accords de cessez-le-feu, un accord de paix, la création d’un parlement biconfessionnel et d’innombrables crises politiques. En juillet 1999, il a été impossible de former un gouvernement mixte, ce qui a eu pour effet de geler le processus de paix pour un certain temps, les unionistes protestants ayant boycotté la séance qui devait, pour la première fois, voir entrer des ministres catholiques dans le gouvernement nord-irlandais. En fait, David Trimble, le chef du Parti unioniste d'Ulster, a rejeté le plan de paix en persistant à exiger un désarmement immédiat de l'Armée républicaine irlandaise (IRA); son acceptation du partage du pouvoir avec la branche politique de l'IRA, le Sinn Fein, était à ce prix. Pourtant, l'accord de paix d'avril 1998 — appelé l’accord du Vendredi saint — prévoyait initialement que le désarmement n'interviendrait qu'en mai 2000, plus d'un an après la mise en place des nouvelles institutions. Mais l'IRA a refusé de déposer les armes tant que le gouvernement ne serait pas formé et a menacé à mots de rompre le cessez-le-feu si les négociations n'aboutissaient pas. Un accord temporaire a été trouvé — le désarmement de l’IRA devait commencer dès la formation de l’Exécutif nord-irlandais — et le gouvernement nord-irlandais a été formé le 2 décembre 1999. Mais un peu plus de deux mois plus tard (le 12 février 2000), le gouvernement britannique adoptait au Parlement une loi suspendant temporairement les jeunes institutions en place en Irlande du Nord, en raison de l’absence (ou du commencement) de désarmement de l’IRA (pourtant prévue pour mai 2000). La suspension du gouvernement nord-irlandais signifiait que le gouvernement britannique reprenait la gestion directe de la «province» nord-irlandaise, comme il l’a fait quasiment sans interruption depuis 1972. Pendant ce temps, les dirigeants, tant catholiques que protestants, se sont rejeté la faute de l’échec de leur seconde tentative de se gouverner eux-mêmes. D’ailleurs, certains députés protestants ont même laissé entendre que cette situation leur plaisait dans le mesure où Londres conserverait sa mainmise en Irlande du Nord. Les relations anglo-irlandaises fonctionnent sur un mode colonial depuis plus de huit siècles: elles ne changeront pas en un jour.
Le statut de l'irlandais est défini dans quelques lois britanniques, dont l'ordonnance de 1989 sur l'éducation pour l'Irlande du Nord (Education Order of Northern Ireland), l'ordonnance de 1999 pour l'Irlande du Nord sur la coopération Nord/Sud (The North/South Co-operation [Implementation Bodies] Northern Ireland Order 1999), l'accord de Belfast ou Accord du Vendredi saint (Belfast Agreement ou Good Friday Agreement), l'ordonnance de 1998 sur l'éducation pour l'Irlande du Nord (Education Order of Northern Ireland), l'ordonnance de 1995 sur l'administration locale (dispositions diverses) pour l'Irlande du Nord (Local Government Northern Ireland Order- Miscellaneous Provisions).
En réalité, la situation de l'Irlande du Nord s'avère différente de celle l'Écosse et du pays de Galles. Il serait abusif de parler de statut juridique particulier en Irlande du Nord. En effet, l'irlandais n'a aucun statut officiel dans les six comtés de l'Irlande du Nord. L'anglais demeure la seule langue officielle de cette région ou «province» du Royaume-Uni.
5.1 La langue de la législation
En vertu de l'accord de Belfast signé le 10 avril 1998, le gouvernement du Royaume-Uni s'engage, conjointement avec la république d'Irlande, à favoriser activement la diversité linguistique, ce qui est encore loin de la reconnaissance officielle de l'irlandais. En outre, le gouvernement du Royaume-Uni s'engage à rendre accessibles en irlandais les textes législatifs nationaux les plus importants et ceux qui concernent particulièrement les locuteurs de cette langue, à moins que ces textes ne soient déjà disponibles autrement. Les textes officiels nationaux suivants ont été traduits et sont disponibles en irlandais: l'ordonnance n° 1759 de 1998 sur l'éducation (pour l'Irlande du Nord), l'ordonnance n° 549 de 1999 pour l'Irlande du Nord sur la coopération Nord/Sud ainsi que la loi de 1998 sur l'Irlande du Nord (le chapitre 47).
Cependant, l'Assemblée d'Irlande du Nord peut autoriser l'utilisation de l'irlandais lors de ses débats; elle a d'ailleurs pris des dispositions dans ce sens. L'Assemblée emploie aujourd'hui à plein-temps une personne chargée de la traduction et de l'interprétation en irlandais. Le Foras na Gaeilge, (le Bureau de la langue irlandaise), a même rédigé un dictionnaire des termes parlementaires, lequel a été publié le 27 mai 2002 par le président de l'Assemblée législative d'Irlande du Nord.
5.2 La justice
En matière de justice, il n'existe aucune disposition juridique sur la langue irlandaise. Il n'est donc pas possible d'utiliser l'irlandais dans un tribunal situé en Irlande du Nord.
5.3 L'Administration publique
Jusqu'à récemment, seul l’anglais était permis, aussi bien pour l’administration locale de l’Irlande du Nord que pour celle de Sa Majesté. Ajoutons qu’une loi du 13 décembre 1949, la Loi sur la santé publique et l'administration locale (Public Healt and Local Government Act), a même interdit l'usage de l'irlandais sur les plaques odonymiques (noms de rue). Cette loi est demeurée en vigueur jusqu’à aujourd'hui. Cependant, l'ordonnance de 1995 sur l'administration locale pour l'Irlande du Nord a réintroduit une législation donnant aux Conseils le pouvoir de nommer les rues dans une «langue quelconque», parallèlement à dénomination anglaise. Ce texte a permis l'adoption de noms de rues bilingues anglais-irlandais et anglais-écossais en Ulster. Un certain nombre d'affiches odonymiques (environ 500) ont été ont été libellées en irlandais et en anglais. Pour ce qui est de la signalisation routière, on ne compte que quelques panneaux bilingues (anglais-irlandais) près de la frontière de la république d'Irlande, là où est concentrée une partie des irlandais celtophones (catholiques).
Cela dit, les autorités locales et régionales pourront dorénavant permettre et encourager les locuteurs de l'irlandais à présenter des demandes orales ou écrites dans cette langue. Pour le moment, la politique du gouvernement n'interdit pas aux autorités locales (les Conseils de district) ou régionales (l'Assemblée) d'accepter des demandes orales ou écrites en irlandais. Dès maintenant, les services publics doivent faire en sorte de permettre aux locuteurs de l'irlandais de formuler toute demande dans leur langue. Une messagerie vocale a été mise en place pour les membres du public qui souhaitent effectuer leurs démarches en irlandais.
5.4 L'éducation
D'après l'ordonnance de 1998 sur l'éducation pour l'Irlande du Nord, le ministère nord-irlandais de l'Éducation a l'obligation d'encourager et d'organiser le développement de l'enseignement en langue irlandaise. Le même ministère a créé, en août 2000, un organisme (le Comhairle na Gaelscolaíochta) chargé de la promotion de l'irlandais; cet organisme a pour objectifs de promouvoir, d'organiser et d'encourager le développement de l'enseignement en irlandais en Irlande du Nord, de représenter ce secteur et d'entretenir des liens avec le Ministère, en le conseillant sur différentes questions relatives à l'enseignement de l'irlandais.
La langue irlandaise est incluse dans le Programme national en Angleterre ("National Curriculum in England"). L'irlandais est proposé comme matière facultative au GCSE (certificat d'études secondaires, normalement obtenu vers 16 ans) et des examens d'irlandais peuvent être passés au GCSE et au niveau (level) «A» (équivalent du baccalauréat).
Les structures préscolaires de langue irlandaise peuvent bénéficier d'un financement d'après le «Programme d'expansion de l'éducation préscolaire» ("Pre-school Education Expansion Programme"); ces écoles maternelles irlandaises peuvent bénéficier du plein statut d'école maternelle subventionnée lorsqu'il est démontré qu'une demande suffisante garantit la viabilité et l'efficacité de l'école. En 2001-2002, quelque 470 places avaient ont été financées.
Le statut d'école subventionnée a été accordé à plusieurs écoles primaires de langue irlandaise. Parmi les critères de viabilité pour ces écoles primaires irlandaises et mixtes (irlandais-anglais), il faut compter un minimum de 15 élèves pour les écoles de Belfast et Derry (Londonderry) et 12 partout ailleurs. Il est rare que l'irlandais soit enseigné dans les écoles primaires catholiques. Néanmoins, il existe une section pour l'enseignement de l'irlandais dans les «Irish Medium Primary Schools». On y compte quelque 35 écoles maternelles (Naíscoileanna) dont peu sont financées par le gouvernement, 25 écoles primaires (Bunscoileanna) dont 10 sont financées par le gouvernement et deux écoles secondaires (Meánscoileanna), toutes deux financées par le gouvernement: l’une est située à Belfast, l’autre à Londonderry.
Dans les écoles, le système scolaire est semblable au système britannique et l'usage de l'irlandais a toujours été toléré chez les catholiques (dans quelques rares écoles primaires). Depuis la partition de l’Irlande, l'enseignement de l'irlandais a été également offert dans les écoles catholiques secondaires en Irlande du Nord. Avec le National Curriculum et la version nord-irlandaise de 1989 et les programmes d’études qui ont suivi, l'irlandais figure aujourd’hui, au même titre que les langues modernes (étrangères!), au programme des écoles secondaires.
En outre, en ce qui a trait aux territoires autres que ceux sur lesquels l'irlandais est traditionnellement pratiqué, le gouvernement britannique s'engage à autoriser, encourager ou mettre en place, si le nombre des locuteurs de l'irlandais le justifie, un enseignement dans ou de cette langue aux stades appropriés de l'enseignement.
5.5 Les médias
Il n’existe aucun journal en langue irlandaise, mais la BBC diffuse en irlandais 150 heures de radio et seulement trois heures de télévision, et ce, au cours d’une année. Les émissions en irlandais des radios et télévisions de la république d'Irlande (RTE et TG4) peuvent être captées facilement en Irlande du Nord. En raison des nouvelles conditions de diffusion, la couverture de RTE et TG4 est passée de 30 % à près de 70 % de la population d'Irlande du Nord. Bref, ce n'est pas le Pérou!
C'est pourquoi le gouvernement britannique et l'Administration locale ne peuvent qu'encourager la diffusion de l'irlandais. D'ailleurs, le gouvernement britannique s'est engagé à garantir la liberté de réception directe des émissions de radio et de télévision des pays voisins dans une langue pratiquée sous une forme identique ou proche de l'irlandais, et à ne pas s'opposer à la retransmission d'émissions de radio et de télévision des pays voisins dans cette langue; à veiller à ce qu'aucune restriction à la liberté d'expression et à la libre circulation de l'information dans une langue pratiquée sous une forme identique ou proche de l'irlandais ne soit imposée à la presse écrite.
Il ne faut pas se surprendre si la minorité irlandaise de confession catholique se montre massivement insatisfaite de son sort sur le plan des droits linguistiques, et ce, dans tous les domaines: la justice, lenseignement, les services gouvernementaux et municipaux, le monde du travail, la publicité et même les services religieux. C'est le résultat d'une longue politique d'assimilation pratiquée par les différents gouvernements anglais au cours de l'histoire. Maintenant que l'irlandais ne peut plus constituer un danger pour langlais, sa survie étant devenue précaire, le gouvernement de Sa Majesté peut se payer le luxe de la générosité en accordant une certaine autonomie politique aux Irlandais, qui pourront dorénavant tenter de restaurer leur langue ancestrale et de gérer leurs propres affaires.
Certes, les réformes du Royaume-Uni étaient nécessaires, mais elles semblent arriver trop tard. Lassimilation est devenue une issue incontournable pour les minorités nationales du Royaume-Uni. Plus rien nempêchera la très grande majorité des Écossais, des Gallois et des Irlandais de continuer à faire usage de langlais dans leur vie quotidienne, à leur travail ou à lécole. Peu importe les subventions gouvernementales de Sa Majesté, les directives de lUnion européenne, la restauration des gouvernements régionaux ou les campagnes de promotion linguistique, limaginaire collectif de toutes les minorités continuera de sexprimer en anglais. Le gallois, le gaélique écossais et lirlandais risquent de demeurer des «langues de décoration» quon emploiera dans les lois, les noms de rue, les menus de restaurant, etc., mais pas dans la vraie vie. Ces langues ont plus de chance de demeurer des symboles de lidentité collective des sujets «autochtones» de Sa Majesté que de devenir des instruments de communication généralisés dans la vie quotidienne.
Enfin, il faut souligner fortement que le territoire actuel de l'Irlande du Nod constitue aujourd'hui un anachronisme destiné à protéger ad nauseam la minorité anglo-protestante de l'île d'Irlande. Pendant ce temps, les Nord-Irlandais jouent encore à une guerre rétrograde qui relève du Moyen Âge. Or, le gouvernement britannique n'a plus l'énergie nécessaire pour perpétuer un passé colonial de plusieurs siècles, pendant lequel il a défendu ses intérêts économiques et stratégiques dans l'île, sans tenir compte des souhaits de la majorité du peuple irlandais.
Certes, Londres joue encore un rôle-clé dans le conflit irlandais et sa position, fatalement partiale, n'a pas fini de conditionner le contenu et l'issue des négociations jamais terminées. Puis, il y a eu cet événement crucial: les attentats terroristes du 11 septembre aux États-Unis. Pendant un bout de temps, il n’y a plus eu de mitraillette et les républicains de l’Irlande du Nord ont choisi la voie politique. L’IRA a déposé les armes. Ce geste historique a été salué partout dans le monde. La célèbre maxime de l'IRA «un bulletin de vote dans une main, une mitraillette dans l'autre» ne fonctionne plus. Depuis que la Grande-Bretagne est devenue une alliée des États-Unis dans la lutte aux terroristes, l'IRA avait perdu toute liberté d'action, sauf rentrer dans «le club des bons gars». Il aura fallu une secousse sismique, les attentats du 11 septembre 2001, pour forcer l’IRA à désarmer.
Quoi qu’il en soit, la Grande-Bretagne et surtout les protestants nord-irlandais devront se faire à l’idée que l'Ulster va un jour leur échapper et retournera vraisemblablement à la république d'Irlande.